« Après 40 ans, les bilans de santé réduisent bien la mortalité »*

Selon une étude publiée dans BMC Medicine, le bilan de santé proposé par les médecins généralistes anglais aux adultes de 40 à 74 ans réduit le risque de maladies cardio-vasculaires et de décès chez ceux qui en ont bénéficié. Mais le débat n'est pas clos sur l'efficacité des bilans de santé.

En Angleterre, un bilan de santé proposé tous les cinq ans aux plus de 40 ans en bonne santé

Depuis 2009, le National health service (NHS) propose aux personnes âgées de 40 à 74 ans en bonne santé un examen de santé gratuit, le NHS Health Check. Selon les statistiques disponibles, entre 46 % et 53 % des personnes concernées bénéficient de ce bilan de santé en Angleterre. Ces bilans sont proposés, une fois tous les cinq ans, par le médecin généraliste (général practitionner), le conseil municipal, voire le pharmacien (il faut rappeler qu’en Angleterre, l’assurance maladie n’existe pas, le NHS étant un service public étatisé). Ce contrôle dure environ 20 à 30 minutes et comprend les mesures habituelles en termes de taille, poids, tension artérielle, test de cholestérol, test de glycémie, avec éventuellement un bilan sanguin supplémentaire. Les participants doivent également renseigner un questionnaire sur leurs habitudes de vie.

 

Près de 100 000 personnes incluses dans l'étude

Une fois exclues les personnes chez lesquelles une pathologie avait déjà été diagnostiquée, les chercheurs de l’université d’Oxford et de l’Institut Alan Turing de Londres ont extrait de la cohorte UK-Biobanck deux groupes inclus entre la période 2006-2010 de 48 000 personnes; un groupe de personnes ayant participé au NHS health check, et un groupe structurellement équivalent de cas témoins n’ayant pas bénéficié de ce bilan. Les dossiers médicaux ont été analysés avec un suivi de neuf ans en moyenne.

Les résultats de cette étude ont été publiés dans la revue BMC Médecine, en janvier 2024 (libre accès en anglais). Au cours des deux années qui ont suivi le bilan de santé du NHS, des taux de diagnostic plus élevés ont été observés pour l'hypertension, un taux de cholestérol élevé et en termes de maladie rénale chronique chez les bénéficiaires d'un bilan de santé par rapport à leurs homologues appariés. Par ailleurs, à plus long terme, les bénéficiaires du NHS Health Check présentent un risque significativement plus faible pour toutes les maladies multiviscérales. « Ce résultat semble lié à une détection plus précoce de facteurs de risque tels que l’hypertension et l’excès de cholestérol, qui permet de les prendre en charge avant que la maladie ne s’installe » affirment les auteurs.

 

Il n'y a pas de consensus concernant l'efficacité des bilans de santé

Jusqu’à présent, la littérature scientifique n’a pas mis en évidence de manière aussi marquée l’intérêt de généraliser à grande échelle les examens de prévention auprès de la population de 40 ans ou plus en bonne santé. Selon les auteurs « ces changements significatifs ne peuvent être imputés au seul effet d’un rendez-vous de 15 minutes. Il est plus vraisemblable qu’ils sont plutôt imputables à une détection précoce et à un traitement renforcé des facteurs de risque (diabète, hypertension, taux de cholestérol élevé), à des consultations en face à face régulières pour faire évoluer les habitudes de vie (activité physique, tabagisme), et à une meilleure gestion des pathologies sous-jacentes (artériosclérose et fibrillation auriculaire). Par ailleurs, « le bilan de santé initial installe une relation avec l’équipe de soins primaires qui n’est pas de même nature pour des personnes apparemment en bonne santé ».

Les auteurs de l’étude indiquent également que leur cohorte comporte un biais de sélection (les deux échantillons sont extraits de la cohorte UK-biobank), avec souvent des personnes plus éduquées et d’un niveau socio-économique plus élevé que la moyenne, ce qui renforce sans doute l’effet positif des résultats. Ces bilans permettent d’éviter des hospitalisations ultérieures et des décès pour les personnes qui en bénéficient, mais ce dispositif risque d’accentuer les inégalités de santé entre les personnes les plus perméables aux messages de prévention, et les autres.


* Titre de l'article emprunté à Delphine Chayet, 24 janvier, Le Figaro Santé (réservé aux abonnés)
** Personnes ne présentant aucune des conditions préexistantes en matière de maladies de l’appareil circulatoire, maladie rénale chronique, diabète, hypertension artérielle (hypertension), taux de cholestérol élevé (hypercholestérolémie familiale)