41 % des cancers considérés comme "évitables"

Selon le Centre international de Recherche sur le Cancer (CIRC), moins de 1 % des cancers pourraient être attribués à la pollution de l’air extérieur, contre 20 % pour le tabac, première cause d’apparition de cette maladie. Si l’on regroupe l’alimentation, le surpoids et l’obésité, ces différents facteurs atteignent la deuxième place. Autre constat de cette étude, la perception de la population est très éloignée des données scientifiques.

Créé en 1965 à l'initiative de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le CIRC, qui est installé à Lyon où il emploie plus de 300 personnes, est chargé de promouvoir les collaborations internationales dans le domaine de la recherche sur le cancer. Ce centre autonome de l'OMS vient de publier les résultats de travaux consacrés à l’évaluation du nombre de cancers attribuables au mode de vie et à l’environnement en France. 13 facteurs de risque pour lesquels on dispose de données scientifiques validées ont été utilisés dans l’étude :

  • Tabagisme, (dont tabagisme passif), consommation de boissons alcoolisées, alimentation, surpoids et obésité, activité physique insuffisante, utilisation d’hormones exogènes, allaitement (durée sous-optimale), infections, radiations ionisantes, pollution atmosphérique, rayonnement UV, expositions professionnelles et exposition aux substances chimiques en population générale (arsenic dans l’eau de boisson et benzène dans l’air intérieur).

Premier constat, 41 % des cancers peuvent être attribués aux modes de vie ou à des facteurs environnementaux en France, contre 38 % en Angleterre et 32 % en Australie. Les « meilleurs résultats » de l’Australie sont notamment liés à un impact beaucoup moins important du tabagisme.

 

Pas de surprise, tabac (20 % du total des cancers) et alcool (8 %) arrivent en tête du classement en France. On comprend pourquoi la prévention du tabagisme reste une priorité de santé en France. Les différences entre pays peuvent être importantes : ainsi, en Australie, seulement 13,4 % des cancers sont attribuables au tabagisme.

Tabac et alcool viennent en tête du classement, pour les hommes comme pour les femmes mais dans des proportions très différentes, en particulier pour le tabac (29 % vs 9,3 %). Chez les hommes, l’alimentation et les expositions professionnelles arrivent au troisième rang, 5,7 % des cancers pour chacune de ces deux causes. Chez les femmes, le surpoids et l’obésité sont la troisième cause d’apparition des cancers (6,8 %), devant l’alimentation (5,1 %).

 

Cette enquête révèle également le « faible » impact de la pollution extérieure, qui ne représenterait qu'environ 1 % des nouveaux cas de cancers. Ce résultat ne coïncide pas avec les perceptions de nos concitoyens qui considèrent que la pollution provoque plus de cancers que l’alcool.

 

Ces résultats sont en réalité fortement liés à l’évolution des connaissances dans ce domaine et à la manière de déterminer les facteurs de risque des cancers, qui, dans la plupart des cas, sont multiples. Ainsi, au cours des deux dernières décennies, les liens entre l’alimentation ou l’obésité et le cancer ont été profondément réévalués. Globalement, un peu plus de 10 % des cancers seraient attribuables à l’une de ces causes (contre 8 % pour l’alcool).

En ce qui concerne les cancers attribuables aux expositions professionnelles (5,7 % des cancers chez les hommes), certains chercheurs de Santé publique France estiment qu'il est nécessaire d'élargir la reconnaissance professionnelle de cancers dont la causalité génétique, ou hormonale reste trop exclusive, préoccupations qui peuvent entrer en conflit avec les intérêts de certains employeurs qui cherchent au contraire à limiter la reconnaissance de cancers au titre de maladies professionnelles. 

 

En matière d’épidémiologie des cancers, la France dispose de nombreux atouts, en plus de la présence du CIRC, à Lyon. L’institut national du cancer (INCA) a en charge le pilotage de la politique de santé au plan national et finance des travaux de recherche relatifs à l’épidémiologie et à la prise en charge des cancers. L’épidémiologie des cancers est également estimée grâce aux travaux de la trentaine de registres des cancers qui réalisent un recueil continu et exhaustif de données nominatives pour tous les nouveaux cas de cancers.

 

Avec 41 % de cancers évitables (soit environ 142 000 nouveaux cas par an), les enjeux de prévention apparaissent considérables. Mais si la France dispose à présent d’équipes scientifiques performantes sur le plan épidémiologique, notre pays n’a jamais été en mesure jusqu’à présent de bâtir une politique de prévention, adaptée aux enjeux.