Les députés s'attaquent aux déserts médicaux

Un premier texte de loi, qui vient d'être adopté en première lecture par l'Assemblée nationale, autorise un accès direct à trois professions paramédicales : infirmier, masseur-kinésithérapeute et orthophoniste. Un deuxième, qui doit être examiné en mars, concerne la régulation par les ARS de l'installation des médecins.

Matthias Brunn, chercheur en sciences politiques, nous explique dans The conversation, la manière d'aborder ces questions chez nos voisins allemands.

 

La proposition de loi n°362 portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance (dite loi Rist) ouvre l’accès direct aux infirmiers de pratique avancée, masseurs-kinésithérapeutes et orthophonistes, dès lors qu’ils travaillent dans une structure d’exercice coordonné (maisons de santé pluriprofessionnelle). Rappelons que l’accès direct aux infirmiers est déjà possible dans les services d’urgence hospitaliers (Infirmier organisateur de l’accueil), ces professionnels étant chargés d’orienter les patients, ou dans les Centres médico psychologiques (CMP). 

Le gouvernement a introduit un amendement dans ce texte qui introduit une notion de responsabilité collective de participation à la permanence des soins (mesure censurée par le Conseil Constitutionnel dans la LFSS pour 2023).

Le texte, profondément amendé, a été adopté à l’unanimité en première lecture à l’Assemblée nationale, le 19 janvier dernier. Les discussions sénatoriales en séance publique sont prévues pour le 14 février prochain.

POUR EN SAVOIR PLUS : Note de NILE relative à la Proposition de loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé 

Déserts médicaux : le marronnier de l’Assemblée nationale

« Les déserts médicaux, un "marronnier" de l’Assemblée », affirme Mme Émmanuelle Ménard, députée (non inscrite), à propos des propositions de loi déposées par tous les bancs de l’hémicycle depuis des années, avec une régularité de métronome. Et presque toujours rejetées ou dépossédées de leurs principaux attributs… 

La proposition de loi du groupe Horizons sera débattue à l’Assemblée nationale le 2 mars prochain. Le texte entend lutter contre les déserts médicaux en permettant une meilleure répartition des médecins sur le territoire. L’article 1er instaure une autorisation pour un médecin de s’installer dans un territoire être délivrée par l’Agence régionale de santé, après l’avis du conseil de l’ordre des médecins. Il rend également obligatoire leur participation au service d’accès aux soins (SAS), organisation expérimentale visant à rapprocher médecins urgentistes et libéraux pour organiser la permanence des soins. 

Jusqu'à présent, les syndicats médicaux sont toujours parvenus à empêcher le législateur de remettre en cause la liberté d'installation. Comment admettre qu'une partie importante de la population a de grandes difficultés à accéder au médecin traitant alors que d'autres régions sont véritablement excédentaires ?

ET EN ALLEMAGNE ?

Matthias Brunn, chercheur en sciences politiques, nous explique dans The conversation, la situation en Allemagne dans ce domaine. L’installation des médecins y est régulée par la « planification des besoins » (Bedarfsplanung), qui repose notamment sur un état des lieux statistique du pays, découpé en 395 zones de planification. Pour chacune de ces zones, sont fixées des « densités cibles » pour 14 catégories de médecins (généralistes, neurologues et psychiatres, etc.). L’installation n’est possible que si ce seuil de densité n’est pas dépassé de plus de 10 %. « La limitation de l’installation n’est pas contestée, car ce sont les médecins allemands eux-mêmes qui la mettent en œuvre. Ils disposent en effet de larges compétences pour gérer l’organisation de leur exercice : de la formation (définition des cursus pour les études de médecine, etc.) à la permanence de soins, en passant par la distribution du budget ambulatoire. Ils sont en négociation quasi permanente avec l’Assurance maladie et sont bien représentés au niveau politique », souligne Matthias Brunn.

Voilà de quoi nourrir le débat sur la lutte contre les déserts médicaux dans notre pays.

publié le 24 janvier 2023



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