Santé à voix haute n° 58 est en ligne

Thomas Fatome, directeur général de l'assurance maladie
Thomas Fatome, directeur général de l'assurance maladie

Le rendez-vous manqué de la convention médicale

 Depuis plusieurs mois, notre système de santé connaît une situation de tension sans précédent. Trois années de crise sanitaire ont épuisé les esprits, et de nombreux établissements de santé sont confrontés à une fuite de soignants. Les patients ont de plus en plus de mal à avoir un rendez-vous auprès des généralistes comme des spécialistes, y compris dans les centres urbains, et les services d’urgences ne connaissent pas de repos. Les négociations autour de la convention médicale ayant été retardées d’un an dans le contexte de l’élection présidentielle, les médecins libéraux étaient toujours dans l’attente d’une revalorisation de leurs actes.

 

À leur quasi-unanimité, l’ensemble des syndicats médicaux ont rejeté la proposition qui leur était faite, le document définitif de la convention leur ayant été délivré 3 jours avant la date limite du 28 février. « S’il fallait un signe supplémentaire du grand malaise des médecins libéraux, le refus massif de leurs six syndicats représentatifs de signer la convention que la Caisse nationale d’assurance-maladie leur proposait l’apporte de façon retentissante et inquiétante », souligne le quotidien Le Monde. Directeur de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) depuis un an et demi, Thomas Fatome, qui a une longue carrière au sein des cabinets ministériels, a donc raté ce premier obstacle. Son prédécesseur, Nicolas Revel, directeur de la CNAM de 2014 à 2020, avait eu moins de difficultés à faire accepter la précédente convention (2016). Mais le contexte économique et sanitaire a beaucoup changé ; l’ONDAM a fortement augmenté au cours de la période 2020-2022 pour faire face à la pandémie et les déficits se sont creusés. Par ailleurs, les politiques tardent à montrer leur efficacité pour lutter contre les déserts médicaux, ce qui augmente la pression sur les syndicats médicaux qui s'opposent à toute mesure destiné à réguler l'installation de nouveaux médecins.

Les principaux syndicats de médecins libéraux ayant refusé de signer le projet de convention, s’engage désormais une procédure dite de « règlement arbitral ». Annick Morel (Haut fonctionnaire âgée de 72 ans), est désormais chargée de rédiger ce règlement, dans un délai de trois mois, qui vaudra convention pour une durée de cinq ans. Mais les partenaires conventionnels ont l’obligation de rouvrir des négociations dans un délai de deux ans. Reste à savoir si l’échec des négociations doit être considéré comme un épisode de plus dans les relations toujours agitées entre l’assurance maladie et les libéraux, ou si cet évènement marque la fin d’un système de gouvernance centralisé (le texte conventionnel contient  300 pages) dans lequel l’administration dessine un cadre d’activité toujours plus contraignant, et qui s’applique sans nuance dans tous les départements qui connaissent des situations démographiques et sanitaires fort différentes.

Télécharger Santé à voix haute n°58