Le budget de la sécurité sociale en surchauffe

Rendez-vous annuel pour tous les principaux acteurs des politiques de santé, le PLFSS est examiné à la loupe car il détermine le montant des ressources allouées aux différentes branches de la sécurité sociale. Toute l'ambiguïté du PLFSS est que cette "loi de financement" s'est transformée au fil du temps en un véritable fourre-tout. L’actualité du PLFSS 2021 se concentre autour de deux questions : l’importance des déficits de la sécurité sociale qui atteint des niveaux jamais atteints, et l’intégration de la branche autonomie dans les comptes de la sécurité sociale.

>Les premiers pas de la branche autonomie

>La chute de l'activité économique et l'augmentation des dépenses à l'origine de déficits de grande ampleur

>Un forfait pour remplacer le ticket modérateur aux urgences.

>En bref

>Télécharger le sommaire du projet de loi

Les premiers pas de la branche autonomie

La grande nouveauté de l’édition 2021 du PLFSS est l’insertion dans les comptes de la sécurité sociale d’une cinquième composante, la branche « autonomie » officiellement créée par la loi du 7 août dernier. Pour le moment, la création de la branche autonomie ressemble plutôt à un jeu d’écriture puisque les organismes en charge de ces questions sont déjà en place, aussi bien au niveau national (Caisse nationale de solidarité et d’autonomie-CNSA) qu’au plan local (conseils départementaux et Agences régionales de santé). Pas besoin de créer une nouvelle agence pour gérer le risque « autonomie », une « simple » adaptation des statuts de la Caisse nationale de solidarité et d’autonomie (CNSA) étant nécessaire (article 16 du PLFSS). Les articles 16 et 18 définissent les sources de financement de la branche autonomie, principalement une part de la Contribution sociale généralisée (CSG). Quant à son budget, il est fixé à 31,2 Mds € pour 2021 (article 50). Le projet de « loi relative au grand âge et à l’autonomie » sera discuté par le Parlement début 2021, loi qui devrait élargir le périmètre de la branche autonomie et redéfinir son organisation territoriale.

La chute de l'activité économique et l'augmentation des dépenses à l'origine de déficits de grande ampleur

Pour 2020, la chute d’activité qui provoque une baisse des rentrées fiscales et des cotisations sociales et l’augmentation des dépenses (assurance maladie) conduirait à une dégradation inédite de près de 45 Md€ des soldes sociaux par rapport à 2019, le plus élevé depuis l’instauration de la loi de financement de la sécurité sociale. La branche maladie supporte la dégradation la plus forte, avec un déficit de 29,8 Md€. Toutes les branches, à l’exception de la nouvelle branche Autonomie, seraient en déficit, y compris la branche Accidents du travail-maladies professionnelles.

L’objectif national des dépenses d’assurance-maladie (ONDAM) est fixé quant à lui à 224,6 milliards d’euros, soit 8,9 milliards d’euros de plus que l’ONDAM 2020. Hors dépenses exceptionnelles attachées à la covid, cela correspond à une progression structurelle de 6 %, par la prise en compte des mesures décidées dans le cadre du Ségur de la santé. Par ailleurs, l’ONDAM 2021 intègre également une provision au titre de la poursuite de la gestion de crise (tests, masques, vaccins) pour un montant de 4,3 milliards d’euros. 

ONDAM 2021 (en milliards €)

Soins de ville 98,9
Établissements de santé 92,3
Établissements/services
pour pers. âgées
13,4
Établissements/services
pour pers. handicapées
12,4
Fonds d'intervention régional (FIRE) 3,8
Autres 3,8
 TOTAL  224,6

Un forfait pour remplacer le ticket modérateur aux urgences

Au fil du temps, la loi de financement de la sécurité sociale est devenue un véritable fourre-tout. On y trouve aussi bien des articles relatifs au financement des différentes branches de la sécurité sociale que des mesures concernant la convention médicale, le financement des syndicats de médecins libéraux… ou le ticket modérateur aux urgences.

L’article 28 précise ainsi les nouvelles modalités de tarification des passages aux urgences non suivis d’hospitalisation. Actuellement, un ticket modérateur de 20 % du montant de la facture s’impose aux patients concernés, sauf en cas d’invalidité, d’affection prise en charge à 100 % (ALD), de grossesse, ou en cas de bénéfice de la Complémentaire Santé Solidaire (qui remplace la CMU et l’ACS). Pour ceux qui ne bénéficient pas de l’exonération, ces 20 % peuvent correspondre à une somme élevée si le montant de la facture est lui-même très élevé du fait d’examens ou d’actes médicaux lourds.

Ce ticket modérateur proportionnel au montant de la facture est en général couvert par les assurances santé complémentaires.  Mais pour les trois millions de personnes environ, le plus souvent travailleurs précaires, chômeurs ou inactifs qui n’ont pas de complémentaire, cette somme est à leur charge. S’ils sont insolvables, ce ticket modérateur ne fait qu’amplifier leurs difficultés et pour les hôpitaux les procédures de recouvrement sont lourdes et souvent vouées à l’échec. C’est l’argument invoqué pour introduire dans le PLFSS la suppression de ce ticket modérateur proportionnel afin de le remplacer par un forfait au montant unique (qui sera déterminé ultérieurement par décret) qui ne pénaliserait pas les bénéficiaires d’actes ou d’examens lourds. Remboursable par les assurances complémentaires santé, ce forfait sera également supporté par ceux qui sont actuellement exonérés du ticket modérateur, mais pour un montant minoré. Ces derniers devront donc mettre leur complémentaire santé à contribution. Les patients sans complémentaire santé continueront à supporter un ticket modérateur, mais d’un montant moins importants s’ils ont bénéficié d’actes lourds.

En bref

  •  Nouveau calendrier de la réforme de la tarification (Articles 28, 29).
  • À noter la présence inattendue de l’article 42 relatif aux conditions de mise en œuvre des mesures de contention et d’isolement des malades mentaux (voir Actu 24).
  • Allongement du congé de paternité (Article 35).
  • Prolongement de la prise en charge à 100 % des actes de téléconsultation (Article 32).
  • La convention médicale qui régit les liens entre les médecins libéraux et l’assurance maladie arrive à échéance le 24 octobre 2021. Or les textes organisant la vie conventionnelle prévoient un lancement du processus de négociation dès janvier 2021, soit trois mois avant les élections aux Unions régionales des professions de santé (URPS). Avec une élection présidentielle en mai 2022… il est urgent d’attendre. Dans la version actuelle de l’article de loi, la convention est reportée au 31 mars 2023, pour des négociations qui débuteront donc fin 2022, avec un nouvel exécutif. (Article 33)
  • Nouvelles ressources pour les syndicats représentants les professionnels de santé libéraux (Article 41).
  • Développement des maisons de naissance et des hôtels hospitaliers (Articles 30, 31).
  • Refonte du régime des autorisations temporaires de médicaments pour faciliter la diffusion des médicaments innovants. (Article 38)

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