SOMMAIRE
- La crise sanitaire
- L'après CovID-19
- Acteurs
- Pépites
La demande de soins continue de flamber auprès des services spécialisés CovID-19
· La dernière semaine a été marquée par la montée des cas et des décès, le pic épidémique n’ayant pas encore été atteint. Dans ce contexte, les services hospitaliers ont bien du mal à faire face dans certaines régions à l’augmentation quotidienne du nombre de patients à prendre en charge. Pour le moment, aucun traitement spécifique n’a montré son efficacité et des essais sont en cours. A ce sujet les polémiques scientifiques font rage. Le Pr Barré Sinoussi, prix Nobel pour ses travaux sur le virus du SIDA nous appelle à savoir raison garder.
… mais des recours aux urgences, et des patients moins nombreux dans les cabinets de généralistes, de spécialistes…
· Mais cette crise a aussi des effets inattendus sur les recours aux soins. Santé publique France note ainsi une baisse des recours aux urgences au cours de la première semaine de confinement par rapport à la semaine précédente : - 53% chez les enfants et - 33 % chez les adultes. Le confinement, cela signifie moins de déplacements, dont moins d’accidents, aucun accident de sport ou sur les cours d’école, moins de contacts physiques et donc moins de transmission des affections respiratoires courantes… et aussi des patients qui craignent de croiser le coronavirus dans les salles d’attente des lieux de soins. Cette baisse des recours concerne également les infarctus et les accidents vasculaires cérébraux !
· Dans les cabinets de généralistes l’activité a diminué de 30 % a déclaré le responsable de MG France. La baisse peut aller jusqu’à 98% pour certains spécialistes !
· La déprogrammation des soins non urgents suite au Plan blanc (9 mars) est également à l’origine d’une baisse d’activité dans de nombreux services hospitaliers ou cliniques. C’est d’ailleurs ce qui permet aux hôpitaux de résister à l’afflux de patients du coronavirus dans certaines régions, les personnels de ces services étant susceptibles d’être réquisitionnés pour venir en aide à leurs collègues. Certains médecins s’inquiètent de cet effet indirect du confinement : cette forte diminution des recours aux soins pourrait mettre en danger la vie de certains patients et aggraver certaines pathologies.
Haut les masques
· Depuis le début de l’épidémie, l’action du gouvernement est mise en cause à propos de sa gestion des stocks de masques et de matériels de protection. Un article à découvrir absolument pour comprendre les raisons de la défaillance de l’Etat dans ce domaine : « La France en pénurie de masques : aux origines des décisions d’État. ». Vous connaissez peut-être Roselyne Bachelot, animatrice de la télévision LCI. En 2019, lors de l’épidémie de grippe H1N1 celle-ci occupait le poste de ministre de la santé et avait fait l’objet à l’époque d’attaques très violentes à propos de sa gestion de la crise, et de la commande de masques et de vaccins qui s’était avérée inutile. Aujourd’hui l’ancienne ministre parcourt les différents médias et triomphe ! « La réhabilitation de Bachelot ».
Situation compliquée dans les EHPAD
· La situation est également particulièrement tendue dans le secteur des EHPAD : lorsque le virus y est présent, il peut se diffuser rapidement au sein de l’institution.
Explosion des téléconsultations
· Comme le reste de la population, en période d’épidémie, les cabinets médicaux s’adaptent. L’Assurance Maladie comptabilisait moins de 10 000 téléconsultations par semaine jusque début mars, pour atteindre 80 000 au cours de la première semaine de confinement. Les téléconsultations constituent désormais plus de 11% de l’ensemble des consultations contre moins de 1% avant la crise. Au cours de la semaine du 23 mars, 44% de médecins généralistes ont effectué une téléconsultation, 81% d’entre elles ayant été réalisées par des médecins en tant que médecin traitant de leurs patients.
· Utiles pour respecter la distanciation sociale, la téléconsultation ne présente pas la même efficacité que la consultation physique avec examen clinique. De nombreux praticiens espèrent qu’elle restera un outil utilisable seulement dans des circonstances particulières. Mais elle peut aussi faire évoluer les pratiques et transformer l’exercice médical, dans un certain nombre de situations précises. Lire également : Le Monde du 30 mars
• En ce qui concerne l’après CovID-19, deux théories s’affrontent : ceux qui considèrent que tout continuera comme avant et ceux qui au contraire pensent que cette crise aura un impact durable
sur l’organisation de notre société.
• On peut d’ores et déjà avancer l’idée que le système de santé ne ressortira pas indemne d’une telle aventure et que certaines politiques de santé en seront profondément affectées. Tout d’abord
parce que la crise a mis en évidence, une fois de plus, l’asphyxie financière des établissements de santé, et ceux-ci sauront rappeler à l’exécutif ses engagements en matière de
moyens nouveaux.
• Autre changement attendu, la doctrine de surveillance des maladies infectieuses et d’anticipation des épidémies susceptible d'être revue en profondeur. Pour comprendre ce qui
nous permet d’affirmer une telle certitude, un petit retour en arrière s’impose ! Lorsque l’épidémie de sida a commencé à faire ses premières victimes en France, au début des années 1980, on
s’est aperçu alors que notre pays ne disposait pas d’épidémiologistes. La doctrine de sécurité sanitaire que nous connaissons aujourd’hui, et dont nous mesurons les manquements aujourd’hui, s’est
construite progressivement suite à cette crise. Le ministère de la santé s’est en quelque sorte vidé de son expertise, transférée aux différentes agences sanitaires qui ont vu le jour que ce soit
en matière de surveillance épidémiologique (aujourd’hui Santé publique France), d’autorisation de mise sur le marché des médicaments (ANESM), de l’alimentation, de l’environnement et du travail
(ANSES)…
• Plusieurs plaintes ayant été déposées contre le Premier ministre, l’ex et l’actuel ministre de la Santé Agnès Buzyn et Olivier Véran, et le directeur général de la santé,
Jérome Salomon pour d’éventuels manquements dans la gestion de la crise, et le parti « Les Républicains » ayant déjà annoncé le lancement d’une commission d’enquête parlementaire à l’automne
l’exécutif se trouve dans l’obligation d’agir. Une nouvelle doctrine de surveillance sanitaire devrait voir le jour à l’issue de cette crise.
• Enfin les logiques industrielles seront elles aussi vraisemblablement impactées. Dans le domaine sanitaire, notre appareil industriel nous est apparu inadapté, certains biens
sanitaires stratégiques étant fabriqués en Asie et connaissant des ruptures d’approvisionnement, conséquence directe de la diffusion de l’épidémie. Un souci d’autonomie en cas de crise sanitaire
va imposer le rapatriement de certaines activités industrielles.
Dans chaque numéro, présentation succincte d’une institution gouvernementale ou d’un acteur de santé qui joue un rôle essentiel dans la prise en charge de l’épidémie.
Avant cette crise sanitaire, vous n’aviez sans doute jamais entendu parler de cet organisme : l’EPRUS - Etablissement de préparation aux urgences sanitaires. C’est simple d’ailleurs : il n’existe plus. L’EPRUS a été créé par la loi n° 2007-294 du 5 mars 2007 relative à la préparation du système de santé à des menaces sanitaires de grande ampleur avec un double objectif de gestion de la réserve sanitaire (mobilisation de personnels de santé en supplément pour intervenir sur des lieux de catastrophes) et gestion des stocks stratégiques de produits de santé (antidotes, antiviraux, dispositifs médicaux…) destinés à y faire face. Mais en 2016 l’EPRUS est devenu la Direction alerte et crises au sein de Santé publique France (SPF), l’agence nationale de santé publique née de la fusion entre l’Institut national de veille sanitaire (InVS), l’Institut national d’éducation et de promotion de la santé (INPES), Addiction drogues alcool info service(ADALIS) et l’EPRUS. Une direction qui est aujourd'hui en première ligne pour faire face aux besoins d'équipements de protection, de médicaments...
Chaque semaine, une émission de radio, un tweet, un article de journal, ou un témoignage de professionnels seront sélectionnés et mis en exergue.
· Didier Sicard spécialiste des maladies infectieuses, notamment du VIH, est aujourd'hui professeur émérite à Sorbonne Université. Très impliqué dans la création de l'Institut Pasteur au Laos, il est frappé par le manque de recherches sur le point de départ de l’épidémie, sur les contacts de l’homme et des animaux sauvages porteurs de virus, facilités notamment par la déforestation. Une transcription de son interview sur France culture.
· Même si l’on sait que lire le passé à travers nos lunettes contemporaines expose au risque de surinterprétation, on ne peut qu’être amusé par certaines similitudes entre la situation actuelle et les épidémies d’autrefois décrites par l’historien Jean Delumeau cité par le Nouvel Obs.